Avant-propos
Afin de faire suite à mon essai de 2022, je me suis une année de plus prêté à l’exercice du suivi de mes jeux, aussi assidûment que possible. Le temps faisant son office, j’ai de plus en plus la fâcheuse tendance à vite oublier le gros de mes expériences ludiques, soucis relativement épineux lorsqu’on aime réfléchir autour du médium. Aussi, la finalité reste la même que la dernière fois, à savoir retenir les expériences fortes de l’année passée, avec un focus sur mes différents rattrapages. Attendez-vous donc à une structure similaire pour cette rétrospective 2023. Mais si l’année précédente avait été source de découvertes en tous genres et activités associées au milieu, dans lequel je me plongeais enfin, celle-ci a dépassé mes attentes sur certains points. Encore une fois, tout ce que je souhaitais reprendre n’a pas pu se concrétiser. Il faut dire qu’une bonne moitié de l’année a été presque intégralement consacrée à l’associatif, me contentant sur le plan social, à défaut de me faire beaucoup « produire ». Pourtant, c’était également l’année de la mise en ligne de ce modeste blog (que je n’alimente clairement pas assez, peut-être un objectif de 2024 ?), l’écriture de compte-rendus d’événements mensuels de jeux de combat ou encore la création de deux podcasts liés au jeu vidéo, qui m’ont par ailleurs quelque peu libéré du poids de l’illégitimité en terme d’analyse. Et ce, même si ces deux émissions n’ont peu le moment que très peu d’épisodes. Ça existe, et c’est le principal. Encore une année chargée donc, que je vais m’efforcer de détailler dans la suite.
Un regard nouveau
Si vous vous souvenez du précédent dossier, vous n’êtes pas sans savoir que ma vocation première est de mettre en avant les œuvres étant passées sous les radars, mésestimées ou bien nécessitant d’êtres vues sous un angle différent, et ce quelle que soit la génération de console. J’avais notamment évoqué mon relatif retard comparé aux personnes de mon âge partageant le même intérêt dévorant pour le jeu vidéo, en appuyant sur le caractère finalement assez peu accessible du jeu vidéo. Cela prenait notamment en compte ma réalité du moment, à savoir mon retard côté consoles, et mon PC vieillissant qui peinait au fil des ans à faire tourner décemment les jeux récents. Sachez que par un plutôt agréable concours de circonstances, me voilà de nouveau à jour des deux côtés. Profitant à la fois d’une offre promotionnelle de Xbox Series S à 1€ (littéralement) et d’un prix avantageux sur l’achat de la config d’un ami, me voilà désormais à jour, du moins pour le moment. Si 2022 était plutôt marquée par les rattrapages relativement anciens, 2023 s’est quant à elle placée sous le signe du Game Pass. En effet, grâce à mon acquisition de l’entrée de gamme de la dernière génération de consoles Microsoft, j’avais le support tout trouvé pour profiter confortablement de ce service. Et si mes expérimentations de son catalogues sont encore assez frileuses, sortant difficilement de ma zone de confort, celui-ci a su se montrer particulièrement convaincant, et laisse entrevoir de futures entrées intéressantes pour 2024.
L’avantage de tenir une liste, c’est que faire des tendances devient vite assez aisé, pour peu que les critères soient suffisamment étoffés. Dans la mesure où c’était seulement la seconde itération de cet exercice, certains d’entre eux manquent encore, comme par exemple le service d’où provient le jeu. En règle générale, je ne me pose pas nécessairement pas la question, et la distinction n’est jamais faite, par exemple sur PC, entre GoG, Steam ou encore Game Pass. Mais je pense qu’il serait intéressant à l’avenir de faire ressortir ce type de donnée, ne serait-ce qu’à titre indicatif. Le format sera de toutes façons constamment en mouvement, et l’affinage se fera au fil du temps. Cette année, donc, hormis les deux jeux Wii lancés dans la même soirée, le reste de mes rattrapages ne va pas plus bas que la Xbox 360, et oscille principalement entre PC et Xbox Series, avec quelques rares entrées PS4. Une liste résolument très différentes de l’année précédente, misant cette fois sur la facilité d’accès offerte par le Game Pass, mais également sur un historique d’abonnement Humble Bundle, qu’il était grand temps de défricher un peu. J’ai donc, au cours de l’année, pu recenser 50 jeux, dont 31 terminés. Un constat relativement proche de l’an passé, avec des ratios équivalents entre jeux commencés et finis. Mais ce qu’il est intéressant de noter, c’est que sur ces 50 entrées, 17 proviennent du Game Pass. Entre des indés aux concepts forts, des sorties marquantes de l’année ou encore diverses itérations de Yakuza, on peut dire que le service m’a plutôt bien accompagné tout au long de l’année. Et cela me permet donc de faire le lien avec mon discours sur le coût du jeu vidéo énoncé dans la rétrospective précédente : le Game Pass est une excellente alternative à cette problématique. Certes, tout n’est pas rose. Les accords avec les développeurs sont assez flous, la tarification est totalement dépendante de Microsoft, tout comme son catalogue, qui voit régulièrement des jeux quitter la plateforme. Et tout ça, sans compter les frasques récentes de la firme, dont la plus évidente reste le licenciement massif de ce début d’année. Mais dans sa globalité, pour un joueur un minimum curieux, c’est une véritable mine d’or. Et je dis ça malgré ma méfiance envers les grosses structures du domaine, dont on connaît désormais la propension à multiplier les techniques marketing et commerciales plus que doûteuses. Malgré cet assez gros score de jeux estampillés Game Pass dans la liste, mon jeu de l’année n’y figure pas. Et vous risquez de ne pas être très surpris de son titre.
Cas particulier
Pour être tout à fait honnête, j’ai mis du temps à vraiment l’apprécier. Et j’aurai également pu retenir Alan Wake 2, pour sa maîtrise de la narration et de la mise en scène, ou encore Hi Fi Rush, le rafraîchissant mélange de beat’em up nerveux et de jeu de rythme qui a su m’accrocher de par ses mécaniques précises et sa jouabilité sans faille. Mais en dépit de mon amour pour ces deux titre, c’est sur Baldur’s Gate 3 de Larian Studios que mon choix s’est arrêté. Si vous suivez un tant soi peu le milieu du jeu vidéo, il est quasiment impossible que vous soyez passés à côté de ce raz de marée, dont le succès a très largement dépassé la niche dans laquelle il se plaçait. Car Baldur’s Gate 3, à l’instar de ses prédécesseurs, est un C-RPG, c’est à dire un jeu de rôle occidental, souvent inspiré (et c’est le cas ici) par le jeu de rôle papier. Un genre réputé pour la complexité de ses systèmes, son fort attrait pour la narration littéraire (se traduisant donc par des pavés de texte) et l’investissement nécessaire pour en voir le bout. Une philosophie à contre courant du marché AAA actuel, qui vise le plus large public possible en lissant au maximum les aspérités, quitte à en perdre toute identité propre. Ce n’est en rien une critique de ce segment du marché, bien que j’ai quelques griefs envers ces procédés, mais un simple constat. Baldur’s Gate 3 n’aurait pas dû s’imposer à ce point dans le paysage vidéoludique de 2023. Mais si ça permet de mettre le nez de l’industrie dans ses propres errances, et ouvre ainsi une porte vers de nouvelles perspectives pour le genre du RPG, je ne vais clairement pas m’en plaindre. Enfin, pour ce point en particulier, seul l’avenir nous le dira.
Toujours est-il que sa sortie m’inquiétais. Si vous suivez le podcast Pad Potes que je co-anime avec Oni, vous connaissez déjà mon avis sur la précédente production de Larian, à savoir Divinity : Original Sin 2 (dit D:OS2). Parsemé de longueurs, de choix d’ergonomie discutables ou encore d’errances narratives, son parcours m’avais été plus que fastidieux. C’est donc avec une appréhension non dissimulée que je me préparais tout de même à la sortie de notre sujet. Et les premières heures sont venues confirmer certaines de mes doutes. Toujours doté d’une ergonomie plus que perfectible (je pense notamment à son inventaire), il faut néanmoins reconnaître que l’un des gros points noirs D:OS2, à savoir sa narration trop peu engageante, a bénéficié d’un soin tout particulier ici. Plus de pavés de textes parsemés des didascalies du narrateur, place aux champs/contre-champs plus « classiques », épaulés par un voice acting et une performance capture très solides. Ce que la narration perd en originalité, elle le gagne en efficacité. Et s’il faut trouver les raisons au succès fulgurant de BG3, ce point en est l’un des candidats privilégiés à mon sens. Ajoutons à cela un soin appliqué aux relations entre les différents personnages, avec la possibilité de romancer n’importe qui, et ce quel que soit notre genre, et on a déjà plusieurs éléments de réponse. Mais ce qui m’intéresse personnellement, c’est le game design.
Et c’est cet aspect qui m’a vraiment fait accrocher. J’ai omis de le mentionner, mais BG3 est basé sure la cinquième édition de Donjons & Dragons, système que j’utilisais à ma table de JdR depuis plus d’un an, sans vraiment avoir approfondi les concepts même plus basiques. Cet apprentissage, c’est finalement par le biais de BG3 qu’il va s’opérer (même si je maintiens qu’on commence à s’amuser un peu seulement à partir du niveau 5). Et c’est sans compter son approche très orientée immersive sim, qui fait la part belle aux manipulations d’éléments physiques pour résoudre de multiples situations de jeu. Le système de combat, malgré une profusion d’informations, reste assez clair et intuitif, la mise en scène des arènes de boss est bien plus percutante que dans D:OS2, et les possibilités offertes en termes de builds sont particulièrement étendues. Reste un level design qui peut devenir confus, en particulier dans la seconde partie du jeu (acte 3) et un pacing en dents de scie, assez mal géré passé le boss de l’acte 2, mais c’est globalement très solide. Et je vais m’arrêter là, parce qu’on compte le traiter en détails dans le prochain épisode de Pad Potes.
Passons donc à ce qui va vraiment constituer cette rétrospective 2023, à savoir mes meilleurs rattrapages de l’année.
Mes meilleurs rattrapages
Si la fin d’année ne m’a laissé que peu de temps en dehors de Baldur’s Gate 3, il faut reconnaître que les mois précédents ont plutôt suivi une tendance inverse, me faisant multiplier les expériences ludiques, à l’image de l’année précédente. Mais, comme évoqué plus haut, la différence réside dans mon usage bien plus prononcé du Game Pass, qui m’a fait relativement délaisser nombre de supports utilisés en 2022. Pas de titres Super NES, GameCube, PS2 voire même PS3, il se pourrait donc que cette rétrospective ne liste pas autant de classiques historiques (et j’entends par là le tableur complet, et pas uniquement ma sélection). Néanmoins, beaucoup de belles expériences ont été parcourues cette année, démontrant la richesse et la créativité de notre médium, quelle que soit l’époque. Pas de laïus sur le patient gaming cette année, je me suis assez étalé comme ça en 2022, et c’était pour faire un parallèle relevant de la coïncidence plus que pour m’inscrire réellement dans cette mouvance. Je vais probablement me répéter, mais si mes habitudes de jeu se rapprochent de ce modèle, la cause est plutôt à rechercher du côté d’un accès compliqué à du matériel et des jeux avant d’avoir des revenus stables, et donc un certain « retard » que je tente vainement de combler au fil des ans.
Quelques petites précisions avant d’entrer dans le vif du sujet s’imposent. Tout d’abord, je ne présenterai que des jeux que j’ai terminé. Cela peut paraître évident, mais je ne l’avais pas explicitement dit la dernière fois, et je tenais à ce que ce soit clair. Ma sélection se fera donc sur les 31 jeux dont j’ai pu voir les crédits de fin. Ensuite, quand je parle de rattrapage, cela ne veut pas dire que les titres ont nécessairement un nombre d’années minimum d’écart pour qu’ils soient considérés comme tels. Un an suffit, tant que l’entrée n’est pas sortie durant l’année traitée. Et, vous le verrez, deux et cinq entrées retenues sont justement de 2022. Et enfin, j’avais évoqué un possible article concernant l’un des jeux d’Hidetaka Suehiro qui me tenait particulièrement à cœur. Pour être tout à fait honnête, après avoir fait l’inventaire des candidats potentiels à présenter, je me voyais difficilement ne pas le mettre, et à la différence de Metal Gear Rising, aucune review n’a encore été écrite à son sujet. Ma prochaine chronique portera donc sur autre chose. En point bonus, j’ajouterai qu’il était évidemment hors de question de mettre plusieurs représentants d’une même série, parce que sinon, au vu de mon année placée sous le signe de Yakuza, cela aurait été trop facile. J’ai donc dû faire un choix, et celui-ci risque fort d’être… surprenant. Mais vous le saurez bien assez tôt, car il est temps de s’y mettre. C’est donc parti pour mes 5 meilleurs rattrapages de 2023.
1. D4: Dark Dreams Don’t Die

Exercice difficile que de parler de D4 : Dark Dreams Don’t Die. Pas tant pour la qualité intrinsèque du jeu (du moins, sur le plan ludique, côté technique on y reviendra plus tard) que pour une raison beaucoup plus simple. À ce jour, et de façon permanente, il n’existe qu’une seule saison de Dark Dreams Don’t Die, ce qui signifie que celui-ci n’a jamais divulgué sa fin. Plutôt problématique pour un jeu basé sur une enquête donc. Rajoutons à cela un rendu visuel indigne de son support de lancement, ainsi qu’un système de jeu pensé à la base pour le motion gaming, et la tâche se complexifie. Tâchons tout de même d’en brosser un portrait suffisamment reluisant pour vous donner envie d’éventuellement vous y essayer. Initialement sorti sur Xbox One en 2014 avec un focus sur l’utilisation du Kinect V2, évolution du périphérique de reconnaissance de mouvement lancé sur Xbox 360, D4 : Dark Dreams Don’t Die (que j’appellerai à présent D4 pour faire plus court) est un jeu d’aventure épisodique développé par Access Games, et dirigé et écrit par Hidetaka « SWERY » Suehiro, à qui l’on doit le surréaliste jeu d’enquête horrifique en monde ouvert Deadly Premonition (pour qui j’ai un amour indéfectible), mais également The Missing, que j’avais présenté l’an dernier. On y suit l’ex-enquêteur des stups David Young, désormais reconverti en détective privé en « trésors oubliés », à la recherche d’un certain D au travers de souvenirs contenus dans des objets précis (dits Mementos), faculté qu’il a à priori toujours possédé. Deux ans auparavant, il pris une balle dans la tête, lui faisant perdre la mémoire, et sa femme fut assassinée. Sa dernière phrase, « Cherche D », servit de déclencheur pour cette enquête, mue avec le temps en véritable obsession. Depuis lors, David ne quitte par son appartement, voyageant dans les souvenirs que des clients lui apportent, avec toujours l’espoir de trouver ce fameux D. L’essentiel de l’intrigue commence lorsque Forrest Kaysen, surnommé Teddy par David, lui apporte un Memento ayant appartenu à l’un des passagers du vol Access Gate Airlines 117 (vous l’avez?), qui se trouvait être un Marshall. Lors du trajet, un autre passager du nom d’Antonio Zapatero, une mule spécialisée dans une drogue appelée « Vrai Sang » (et indic au passage), aurait disparu sans laisser de trace, alors qu’il devait divulguer le nom de son patron aux autorités à son arrivée à Boston. Nom qui, bien entendu, commence par la lettre D.
À ce postulat de départ déjà intriguant s’ajoutera toute une galerie de personnages excentriques, signature des travaux de SWERY, ainsi qu’un concept global à la fois déroutant et logique quand on y pense, un point and click avec une dimension scoring « classique ». Le parti pris de l’équipe a été de laisser quasiment tout le temps le « contrôle » au joueur (comprendre ici qu’il est possible de déplacer le curseur, et parfois orienter la caméra lors des cinématiques, les inputs ne sont pas figés). Cela le conditionne à constamment rester attentif, aux QTEs dans un premier temps (mais classique, surtout pour l’époque), mais également aux divers points d’intérêt pouvant apparaître sur les objets ou dans le décors, et sur lesquels il est nécessaire de maintenir le curseur afin d’engranger des points (qui servent notamment de monnaie pour acheter des skins pour les personnages principaux). On se retrouve donc avec ce mélange particulier de jeu narratif épisode dans la veine d’un The Walking Dead de Telltale par exemple, et de mécanismes qu’on retrouve plutôt dans l’arcade et les genres qui en héritent. Mais encore une fois, ça fonctionne vraiment. Le rythme n’est pas non plus en reste, et se permet d’alterner entre moments de pure investigation, dialogues déglingués typique d’une production SWERY, et QTEs particulièrement bien exécutés et claires, tout en les liants entre eux de manière cohérente. Ce n’est bien entendu pas inédit, les productions Telltale ou encore Life is Strange par exemple (ou les jeux Quantic Dream dans une moindre mesure), mais s’il existe une Suda’s touch (je pense notamment à killer7), depuis ma découverte de Deadly Premonition en 2016 il y a clairement pour moi une Swery’s touch aussi. Celle-ci se caractérise par trois choses : une écriture/ambiance globale très inspirée par le travail de David Lynch (surréalisme perché, dialogues de personnes qui semblent ne pas s’écouter, bref ce genre de chose), un attrait pour la culture américaine (ou plutôt une fascination pour ses représentations fantasmées), ainsi qu’un goût prononcé pour l’expérimentation, mais sans toujours savoir ce qu’il fait. Ça donne des œuvres uniques oscillant entre le génie et le ratage complet (certains jeux penchant plus d’un côté comme de l’autre, et ce de manière franche). C’est dans ce contexte qu’on a un jeu épisodique avec une seule saison (suite à des problèmes de droits depuis le départ de Swery d’Access Games), mettant en scène une enquête que le protagoniste fait exclusivement de chez lui en voyageant physiquement dans les souvenirs, le tout en reprenant les codes du film hardboiled (ex-flic, femme assassinée, alcoolisme, on coche toutes les cases) mais en y injectant cette touche de décalage qui humanisent bien plus les personnages que si le ton s’était efforcé de rester « sérieux ». Et pour enfoncer le clou, un jeu réalisé à la base pour une périphérique presque mort né. Heureusement, l’année suivante sortira la version à laquelle j’ai pu m’essayer, qui fonctionne intégralement au clavier/souris. Mais pour toutes ses sorties de route par rapport au genre auquel il est rattaché et au type d’expérience attendu, il mérite clairement votre temps. Et ce, même si le jeu est en l’état incomplet et ne sera jamais terminé.
2. Yakuza 3

Bon, je l’avais dit, ma sélection pour cette entrée de Yakuza dans la liste est pour le moins déroutante si on connaît un peu la série. En effet, cet opus est régulièrement cité comme le plus faible de toute la série principale, particulièrement pour l’aspect confus et déconnecté de son scénario. Mais commençons par les bases. Yakuza 3, initialement sorti sur Playstation 3 le 26 février 2009 au Japon, et seulement le 12 mars 2010 par chez nous, reprend les bases initiées par la série sur Playstation 2. On retrouve donc ce mélange de beat’em up très arcade et d’action/aventure saupoudré de RPG, le tout servi dans une intrigue mêlant guerres de gangs, politique et problématiques sociales très ancrées dans sa société : le Japon. Et soyons honnêtes, si les situations et les personnages tendent à changer tout au long de la série, celle-ci gardera peu ou prou le même squelette au fil du temps, affinant continuellement sa formule et s’offrant occasionnellement un ravalement de façade pour coller avec les évolutions technologiques. Si ce Yakuza 3 n’est pas le premier pas de la série sur la machine de septième génération de Sony (ce mérite revenant au spin-off Kenzan!, sorti un an plus tôt uniquement au Japon et se déroule à l’ère Edo), cela en reste la première incursion de la formule « classique ». L’occasion pour dynamiser un peu la formule avec un système de combat amélioré (notamment au niveau des combos), et surtout une exploration plus cohérente, directement héritée de Kenzan!, s’extrayant de la méthode des transitions de plans fixes des deux premiers opus. Les résumés de ces derniers sont d’ailleurs disponibles lors de l’introduction du jeu, permettant aux nouveaux venus de commencer la série par le 3 sans rater les événements importants des précédents. Un ajout appréciable et plutôt bien pensé en somme.
Vous le savez déjà si vous avez lu ma précédente rétrospective, mais j’ai commencé Yakuza par le Zéro, qui comme son nom l’indique était un prologue à toute la série, bien que celui-ci soit sorti après Yakuza 5, et donc deux générations après le premier opus. La saga avait eu le temps de se peaufiner, changer de moteur, raffiner ses mécaniques et surtout ses feedbacks, et prendre du galon en terme de réalisation. Chose que n’avait pas encore vraiment Yakuza 3. Pour le gamefeel tout du moins. D’autant plus qu’après Zéro, j’ai enchaîné avec les remakes du 1 et 2, ayant respectivement les moteurs de Yakuza 5 (amélioré avec le Zéro) et 6. Un sacré fossé technique comparé au rendu balbutiant des premiers épisodes PS3. Mais si ses mécaniques, sa progression et sa technique ne paraissent qu’être des ébauches de ce que deviendra la série par la suite, il y a bien une chose que le jeu réussit à merveille. Et pour en parler, je vais devoir brièvement évoquer le synopsis du jeu (mais ne vous inquiétez pas, je serai concis pour éviter tout spoil des deux premiers épisodes). Après des événements qui ont une fois de plus ébranlé le clan Tojo, Kiryu, désireux de laisser sa vie de yakuza derrière lui, décide de partir reprendre un orphelinat à Okinawa, en compagnie d’Haruka (fillette qu’il a recueilli dans Yakuza 1). Mais le monde de la pègre semble décider à continuer de s’immiscer dans la vie, entre les intrigues avec des clans locaux et des conflits internes au clan Tojo, qui l’amèneront à s’impliquer de nouveau. Le tout sans compter les projets autour d’Okinawa (dont une station balnéaire) impliquant politiques, yakuzas et même la CIA. C’est donc à Kiryu que revient la tâche de sauver une nouvelle fois le clan Tojo, tout en protégeant son nouveau foyer, l’orphelinat Morning Glory.
Une storyline riche en complots à tiroirs et autres joyeusetés donc. Mais si celle-ci n’est pas spécialement la plus intéressante, c’est bien lors des segments sur Okinawa que l’on va expérimenter ce qui fait vraiment sortir ce troisième opus du lot : un focus sur le quotidien. Je sais, dit comme ça, difficile de donner envie. Mais après des épisodes centrés exclusivement sur le monde des yakuzas, remettre en avant des enjeux bien moins grandiloquents, comme s’occuper des enfants de l’orphelinat, ou encore laisser plus de temps à la relation entre Kiryu et sa fille adoptive, Haruka, donne à l’ensemble un côté tranche de vie très marqué, et parvient à transmettre au moins autant d’émotions que les moments forts des précédentes entrées de la série. Et même si le reste du jeu reste assez convenu (avec une grosse montée d’intensité dans son dernier acte, comme toujours), je ne peux que vous inviter à vous essayer à Yakuza 3, au moins jusqu’au départ de Kiryu d’Okinawa. Ça vaut vraiment votre temps, et en plus c’est un des épisodes les moins long de cette incroyable saga fleuve.
3. Katana Zero

Si je dois retenir un jeu en particulier qui m’a complètement retourné et excédé mes attentes en 2023, c’est bien Katana Zero. Pourtant, à sa sortie en 2019, le peu de gameplay que j’avais pu entrevoir via un stream quelconque m’avait assez peu accroché. Bien qu’ayant rattrapé et très apprécié Hotline Miami à peine un an ou deux plus tôt (et qu’on puisse faire des ponts évidents entre les deux œuvres), le projet ne m’intéressait pas. Deux raisons principales à cela : l’impression (fausse mais tenace) de juste avoir un Hotline Miami en side scroller, et le type de camera, vue de côté donc. Il faut dire que, bien que cela soit bien plus nuancé en réalité, j’avais cette impression de saturation du marché indé par des projets en vue de côté, draguant la fibre nostalgique des joueurs de manière un peu trop racoleuse à mon goût. Et s’il y a bien une chose que je n’aimais pas (et c’est toujours le cas), c’était bien la nostalgie, un sentiment flou et basé sur le ressenti personnel qui exclue tout regard critique. Ce n’était donc pas bien parti, dans la mesure où je m’étais persuadé que le produit final n’était qu’un ersatz de Hotline Miami forçant encore plus sur la nostalgie, à la fois des années 80 en général et au marché vidéoludique de l’époque (je prendrais le temps un jour de détailler mon approche générale du jeu vidéo, mais ce n’est pas le sujet de ce dossier). Comme je m’étais trompé. Alors, qu’on soit bien d’accord : il est évident que la plupart des éléments constitutifs du jeu sont très référencés, entre le visuel typé SNES énervée, l’OST synthwave ou encore les références SF nippones (entre autres) des 80/90s.
Mais là où Katana Zero tire son épingle du jeu, c’est bien dans sa grammaire ludique. Car, il est maintenant temps d’en parler, ce jeu a été développé par Askiisoft, studio indé à la tête duquel se trouve Justin Stander (créateur et seul membre permanent de la structure). Si ce nom ne vous dit rien, sachez qu’il est notamment responsable de deux jeux que j’avais découvert il y a maintenant de ça dix ans, Tower of Heaven et Pause Ahead. Des purs projets de game designer, posant intelligemment la question du choix et de l’importance des règles du jeu, et comment jouer avec pour enrichir sa proposition. Et, vous vous en doutez, c’est exactement la même philosophie qui transparaît dans Katana Zero. Chaque élément de gameplay, aussi anodin puisse-t-il paraître, trouve un sens dans le setting même du jeu, et bien que parfois cela puisse donner l’impression d’avoir été rentré au chausse-pied, l’attention au détail est vraiment remarquable. Parlons donc un peu plus en détail de ces différents éléments, sans pour autant s’étendre sur l’histoire, dans la mesure où le jeu peut se terminer en une poignée d’heures (3h environ, bien que plusieurs fins existent en fonction de nos choix, pouvant drastiquement changer la trajectoire de la narration).
Comme dit précédemment donc, le jeu emprunte certains concepts à Hotline Miami. Les deux titres partagent la même segmentation de missions, entre tableaux effrénées sur fond de synthwave tantôt entraînante, tantôt atmosphérique, et phases plus calmes et essentiellement narratives. La différence réside dans la nature de ces dernières, dépeignant un protagoniste bien plus expressif (nous donnant très régulièrement des dialogues à multiples choix par exemple) et le mettant en scène à la fois dans son appartement, mais également chez son psy, qui est son principal interlocuteur et commanditaire des assassinats à réaliser. En effet, à l’image de Hotline Miami encore, les missions ont généralement un but meurtrier, et ici le schéma dominant est l’attribution d’une cible à abattre (à l’image d’un Hitman par exemple, mais sans les mécaniques complexes de la série). Cette structure sera bien entendue pas mal tordue et remise en question au long du jeu, mais la base est agencée ainsi. On y joue un homme habillé en samurai au passé trouble, dont la vie se résume à exécuter ses cibles et rentrer dormir à son appartement. Au cours de la partie, le brouillard de ses souvenirs s’éclaircira peu à peu, nous donnant une vision d’ensemble de la réalité des événements, se permettant de développer au passage des thématiques pas vraiment inédites (PTSD de la guerre, inégalités sociales, en bref, beaucoup des grands thèmes qui parcourent les œuvres cyberpunk) mais suffisamment bien intégrées au game design pour être intéressantes à suivre. On se retrouve donc avec une double expérience, à la fois des mission sanglantes, à l’image de Hotline Miami (one hit kill pour nous et les ennemis, mais en vue de côté), avec comme particularité de permettre de ralentir et remonter le temps (expliqué dans le lore par le fait qu’on est sous une drogue expérimentale qui donne cet effet), et moments « calmes » reposant exclusivement sur des choix de dialogues, eux-mêmes particulièrement dynamiques et mettant le choix au centre de la narration. Vraiment, c’est difficile de développer sans gâcher la surprise, mais c’est brillant, et ce dans tous les aspects de sa conception. Et le fait que Justin Stander se soit occupé de la majorité du jeu (écriture, code, game design, level design, visuels, et même quelques musiques additionnelles) le place clairement dans la liste des personnalités de l’industrie à suivre de très près. En conclusion, je ne peux que vous conseiller chaudement de vous essayer à l’expérience, qui respecte votre temps en développant son concept sur un scope réduit mais particulièrement bien rempli. Si vous aimez les gameplays nerveux mais ingénieux, peu de chances que vous en soyez déçus.
4. Signalis

Attaquons-nous à présent à l’œuvre phare de ma retrospective 2023, celle qui m’est le plus longtemps restée en tête et a généré une passion dévorante chez moi : Signalis. Fruit d’une gestation longue de huit ans, le projet a finalement vu le jour en 2022, développé par le studio allemand Rose-Engine (constitué essentiellement du duo Barbara Wittmann et Yuri Stern). Si on pouvait le résumer très brièvement, disons qu’il faut imaginer l’alliance entre la progression d’un Resident Evil (level design, énigmes, inventaire limité et système de combat misant beaucoup sur le risk and reward) et la narration de Silent Hill 2 (on peut même faire le parallèle entre certains protagonistes et situations), le tout baignant dans un setting de conquête spatiale sur fond de société dirigée par un régime totalitaire. Et, petit twist dans les références énoncées, le point de vue est en 3D isométrique. Si ce postulat de départ peut déjà être intriguant pour les amateurs de survival-horror, laissez-moi vous dire que celui-ci va très vite évoluer et manipuler ses références et inspirations avec beaucoup de finesse, donnant des situations de jeu proprement étonnantes. N’ayant commencé à creuser plus profondément le genre horrifique dans le jeu vidéo après Signalis (non pas que celui-ci fût mon premier, mais cela faisait un moment que je restais sur mes acquis de base, et ce malgré un amour indéfectible pour l’horreur), c’est seulement quelques mois avant sa sortie que, par le biais de discussions sur un Discord, j’ai fini par l’ajouter à ma liste de jeux à surveiller, sans pour autant l’attendre avec impatience.
Car, autre composante particulièrement marquant de ce titre, celui-ci a été conçu pour répliquer le rendu qu’on pouvait trouver sur une Playstation 1 (ou éventuellement Saturn) durant la seconde moitié des années 90. Et si, au moment d’écrire ces lignes, cela a bien changé (j’ai énormément creusé la scène par la suite), ce type d’esthétique me laissant jusqu’à présent complètement indifférent. Déjà parce qu’à ce moment là les visuels typé PS1 m’insupportaient (que ce soit ceux d’époque ou le « néo-rétro »), et aussi parce que j’avais l’impression, exactement comme pour Katana Zéro, que c’était une vaine tentative pour jouer sur la corde sensible des nostalgiques de cette époque. Comme je me suis trompé. Si la volonté de rappeler une certaine époque reste notable, c’est justement dans sa manière d’amener cette esthétique dans une proposition bien plus moderne, que ce soit en termes de narration, symbolique, ou encore alternance entre différents « modes » de jeu, chose qu’on a plutôt tendance à voir dans le game design moderne (du moins à cette échelle, ceux qui le faisaient dans les années 80/90 faisant plutôt office d’expérimentateurs). C’est donc bien un produit de son époque, qui se réapproprie des éléments issus de l’héritage même du jeu vidéo pour les arranger à sa manière. Il y aurait également beaucoup à dire sur son histoire, que ce soit sur le plan narratif, symbolique, ou bien les thématiques fortes qui parcourent l’œuvre, mais j’estime que c’est vraiment un jeu à faire, vous n’aurez donc qu’une brève introduction pour poser le cadre.
Le jeu s’ouvre sur le réveil d’Elster, notre protagoniste (une Replika, sorte d’androïde auquel on a associé un schéma de pensée hérité d’un humain, afin de leur permettre d’accomplir leurs tâches plus efficacement), dans ce qui semble être un vaisseau (le Penrose-512) écrasé sur une planète enneigée et sans aucune trace de notre Gestalt (humains de la nation Eusan qui se voient généralement assigner une Replika lors de leurs missions). Bravant la tempête de neige, Elster progresse sur la planète avant de se retrouver face à une sorte d’arche, derrière laquelle se trouve un gigantesque puits aux escaliers descendant dans les profondeurs. Elle trouve au fond une chambre au bout d’un étrange trou horizontal (une référence évidente à Silent Hill 4), dans laquelle se trouve plusieurs éléments notables, dont un coffre fermé par trois cadenas, du matériel radio et surtout, un exemplaire du Roi en Jaune de Robert W. Chambers, par lequel tout va vraiment commencer. S’en suit une cinématique qui me restera en tête de nombreuses années, très chargée en symbolique, références en tous genres et jouant même un peu avec l’aspect meta, et le jeu peut enfin commencer. Et je vais m’arrêter là. Quelle introduction réellement percutante, et ce en une poignée de minutes. Et très honnêtement, c’est très régulièrement le cas tout au long de la progression. Alternance entre images fortes, symbolique exacerbée, backstories tragiques et intriguantes, et effets de styles (plusieurs passages nous font progresser à la première personne, dans des séquences exclusivement narratives à l’ambiance incroyablement planante), le jeu a toujours quelque chose à dire, et le fait passer sans jamais en faire trop, et ce malgré une recette particulièrement chargée.
Pour cette entrée, j’ai probablement été un peu plus évasif, mais c’est très important pour moi que vous découvriez ce chef-d’œuvre avec le moins d’informations narratives possibles au-delà du prologue. Je peux vous assurer que si vous aimer l’horreur (ou ce que je vais appeler le drame horrifique), il y a vraiment peu de chances pour qu’il vous déçoive. Alors oui, sa progression générale reste assez classique, sa réutilisation de mécaniques issues de jeux plus anciens est indéniable (système d’inventaire de Resident Evil, monstres pouvant se relever plus tard et objets limités pour les tuer définitivement, achèvement des adversaires au sol à la Silent Hill, et j’en passe), mais là où le jeu va vraiment briller, c’est par sa mise en scène, son ambiance tantôt éthérée, tantôt absolument étouffante, ou encore son utilisation intelligente de diverses œuvres dans sa narration (le tableau L’Îles des Morts d’Arnold Böcklin, Le Roi en Jaune dont j’ai parlé plus haut), ou encore l’absolu mystère quant à la signification de l’ensemble (du moins, clairement). Le jeu est d’une richesse assez étonnante, fruit d’un travail de longue haleine de seulement deux personnes, et joue sur tellement de mes cordes sensibles que j’ai eu l’impression qu’il avait littéralement été fait pour moi. Laissez-vous absolument tenter, et je vous assure que si ça marche sur vous, Signalis deviendra une obsession, entre traumatisme et émerveillement. Hab keine angst.
5. NORCO

Pour terminer ce tour de mes meilleurs rattrapages de 2023, j’aimerais maintenant parler d’un titre appartenant à un genre que j’ai bien trop peu exploré (malgré un potentiel évident d’émerveillement compte tenu de mes fixations), le point and click. Assez peu au fait des sorties de ce type, c’est par le biais d’un essayiste anglophone dont j’apprécie énormément le contenu (RagnarRox pour info) que j’ai découvert ce Norco, dont la coïncidence veut qu’il soit sorti la même année que Signalis (soit 2022 si vous suivez). Développé par le studio louisianais Geography of Robots, le jeu place son décor dans une version alternative de la ville de Norco en Louisiane, dans un contexte de futur dystopique, à la croisée du cyberpunk et du southern gothic. On y évolue donc majoritairement dans les petites rues de cette ville à l’écart du tumulte et des néons caractéristiques de ce sous-genre de la science fiction, avec quelques incursions dans le bayou et autres paysages chers au southern gothic, le tout plongé dans une ambiance planante, surréaliste par moments, mais également profondément mélancolique. C’est dans ce contexte déjà très riche que nous allons nous immerger, tantôt à travers les yeux de Kay, une jeune femme qui rentre chez elle après des années suite à la nouvelle de la mort de sa mère, et cette dernière quelques mois plus tôt. Les deux routes finiront par se rejoindre en un sens, mais la narration se fait vraiment en parallèle, oscillant entre l’enquête de Kay sur les investigations de sa mère concernant des évènements étranges au lac Pontchartrain, et les recherches de sa mère, embauchée par le Superduck (un réseau à mi-chemin entre cryptomonnaie, IA et un être semi-organique) pour retrouver la Pierre, une orbe mystérieuse détenue par une secte ayant investi un centre commercial abandonné. Si cela paraît déjà assez solide comme postulat de départ, le jeu nous portera assez loin dans son concept, jouant avec les codes mêmes du point and click en y incorporant des éléments de RPG en tour par tour, nous fera infilter une raffinerie de pétrole ou encore naviguer dans les eaux stagnantes du bayou, et le tout se finira en véritable bouquet final surréaliste, à la fois très logique et surprenant.
Si le style visuel se veut proche des œuvres du genre du début/milieu des années 90 (pixel art poussé du fait de la puissance des micro-ordinateurs de l’époque par rapport aux consoles), sa narration et son game design sont résolument très modernes. Je pense que la mécanique la plus représentative de cette volonté de faire cohabiter les deux époque et la « carte mentale » de Kay, représentant les liens entre les différents personnages qu’elle rencontre au cours de l’aventure, y compris avec elle-même, et permettant de rassembler les informations importantes sur ceux-ci, un peu à la manière du tableau de bord dans Outer Wilds, qui recense toutes nos découvertes afin de s’y retrouver dans le gigantesque puzzle que constitue son système planétaire. Ici, l’échelle est bien entendu plus réduite, plus intime car s’inscrivant fortement dans l’histoire et le passé de Kay et ses proches, et les événements ne vont pas au-delà de la ville de Norco (d’où le nom du jeu bien sûr). Mais, si ce genre d’approche est de moins en moins inédite, elle devient primordiale tant sur le plan ludique que narratif, ancrant durablement les protagonistes (et antagonistes) dans le récit, à la fois pour Kay, mais aussi pour nous, joueurs. Comme dans la majorité des jeux du style, l’accent a été mis sur l’écriture, tantôt profondément mélancolique, tantôt franchement drôle, mais ça reste intéressant (et important pour moi) de voir que l’aspect ludique a également bénéficié de ce soin, rendant pour moi la progression bien plus intéressante. Non pas qu’il me soit impossible de faire et apprécier une œuvre qui fait l’impasse sur les éléments de jeu pur pour se concentrer sur le déroulé de son histoire, jusqu’à rendre cet élément central, mais ce que Norco parvient à faire est bien plus en adéquation avec mon profil de joueur, et ce qui va inscrire un jeu durablement dans ma mémoire. Mention spéciale à la bande originale, éthérée, mystérieuse, nostalgique, portant en elle cette aura douce-amère que met si bien en évidence le jeu. Et, dans la mesure où celui-ci participe à certaines pistes, cela m’a également permis de découvrir le groupe de sludge louisianais Thou, que je vous recommande au passage si vous êtes amateurs de musiques lourdes. Je conclurais par ces mots : n’hésitez pas à vous essayer à Norco, c’est une œuvre riche, maline et juste belle, dans tous les aspects de sa conception.
Conclusion
Quelle étrange année que fut 2023. Si celle-ci a très bien démarré à partir du moment où j’ai eu ma rupture conventionnelle et quitté l’entreprise dans laquelle j’étais depuis mon début à Rennes, le dernier trimestre a été particulièrement infernal. La raison pour laquelle je ne parviens à terminer cette rétrospective qu’en Avril 2025, c’est bien parce que pendant l’intégralité de 2024, je n’avais juste pas l’énergie de le faire. Sans rentrer dans les détails, j’ai eu à vivre l’une des phases les plus compliquées de ma vie sur le plan psychologique, au point de devoir recourir à des procédés médicaux que je rechignais jusqu’à présent à utiliser. Et pour être honnête, cette année de « vide » n’était clairement pas de trop, ni « perdue ». Maintenant que ceci a été partiellement éclairci, j’aimerais me concentrer sur le positif que m’a apporté 2023. Car, outre cette fin d’année catastrophique, le reste fut particulièrement riche et stimulant. Tout d’abord, profitant de cinq mois de chômage suite à ma rupture conventionnelle, j’ai pu me concentrer exclusivement à mes activités associatives. Poursuite des cafés-débats, implications maximale dans l’activité des rankings (rassemblements de jeux de combat, organisés par l’équipe dédiée de 3 Hit Combo), avec notamment des rôles dans l’accueil, la trésorerie, la rédaction des compte-rendus (ma partie préférée, car je me permettais des excentricités d’écriture qui me faisaient du bien) et globalement l’organisation et la gestion des événements. Mais aussi une entrée au bureau de 3 Hit Combo en tant que secrétaire, et par ce biais l’ouverture du Stunfest sur la scène avec tous les autres membres du CA. Chose dont je ne me serai jamais cru capable, comme la majorité de ce que j’ai fait au cours de l’année pour être honnête. Mais ce dont je suis le plus fier, reste la mise en place d’un podcast avec une amie, chose dont on parlait depuis quelques temps et sur laquelle j’ai pu trouver un espace d’expression bienvenu, avec une personne avec qui je suis vraiment à l’aise et dont les échanges sont toujours enrichissants. Vous l’aurez compris avec le début de cette conclusion, cette activité est également en pause, mais j’ai à ce jour retrouvé beaucoup d’énergie, donc ça pourrait se relancer à tout moment.
Niveau jeux, je pense en avoir assez dit avec mes précédents points. Je me rends compte que mes éloges envers le Game Pass étaient probablement un peu trop dithyrambiques, bien que je pense sincèrement du bien de ce service. Il ne faut certainement pas oublier qui est derrière (Microsoft), et à quel point son hégémonie sur l’industrie toute entière (on pense notamment à son rachat d’Activision/Blizzard) a de quoi inquiéter, surtout quand on voit la facilité avec laquelle ils peuvent fermer des studios et condamner des centaines d’emplois. Ce ne sont clairement pas les seuls à le faire bien entendu, mais mon point est qu’il faut rester pragmatiques et prudents vis-à-vis de ce genre de structure. Et peut-être éviter les guerres de chapelles qui ne profitent à personne d’autre que les concernés, dont les actions sont toujours catastrophique, quelle que soit la boîte derrière. Soutien à mes camarades du milieu pour qui c’est difficile, et sans qui notre passion n’existerait tout simplement pas. Comme l’an dernier, voici en lien le tableur de l’intégralité de mes jeux de 2023. La rétrospective 2024 arrive bientôt !