C’est au cours de l’été 2014 que, tout à fait par hasard, j’ai profité d’un week-end d’essai gratuit de Mount & Blade : Warband. A ce moment-là, rien ne pouvait me préparer aux semaines qui allaient suivre. Grand amateur et joueur de RPG, il m’était souvent arrivé, au cours de mes nombreuses recherches ultérieures, de croiser le nom de ce jeu, à l’esthétique trop « conventionnelle » et « réaliste » à mes yeux, beaucoup plus habitué aux univers de fantasy. Bien que la recette paraisse intéressante sur le papier, je ne m’y attardais pas. Il aura donc fallu que le jeu « s’invite » sur mon compte Steam pour que je daigne le lancer, probablement l’une de mes meilleures décisions cette année-là (en plus de reprendre mes études). Ce qui ne devait être qu’un test de quelques heures, le temps de la gratuité, s’est transformé en un été entier happé par ce monde, à la fois si familier et singulier (en partie grâce à une faille dans l’offre d’essai, rendant le jeu disponible bien après ce fameux week-end). Mais un peu de contexte s’impose.
Mount & Blade : Warband est un RPG intégrant des éléments de stratégie (comprendre ici qu’on y gère des unités lors d’affrontements), initialement sorti en 2008 dans sa version de base, puis 2010 dans la version qui nous intéresse donc, Warband, qui se présente comme une version améliorée du jeu de base. Développé par les turques de TaleWorlds (assez rare pour être souligné), et éditée par Paradox Interactive, à qui l’ont doit généralement des jeux de stratégie historiques (Europa Universalis, Crusader Kings notamment), le jeu se présente comme un jeu de rôle orienté action, sans but précis et offrant de multiples possibilités, se déroulant dans un monde fictif d’inspiration médiéval, dénué de tout élément de fantasy, Calradia.
On y incarne… un peu qui on veut en fait. Au lancement d’une nouvelle partie, un texte d’introduction nous précise bien qu’en terme de roleplay au vu de l’univers du jeu, il est plus logique de commencer l’aventure avec un homme issu de la noblesse, tout en incitant à plutôt créer un personnage atypique, offrant des situations de début de jeu bien plus intéressantes. La création du personnage est ensuite une suite de questions visant à déterminer l’histoire de notre avatar, à la manière des RPG à l’ancienne (The Elder Scrolls II : Daggerfall en tête), puis suit la classique fiche de personnage avant la sélection de notre contrée de départ (toujours de manière narrative). Après une attaque de bandits (quel que soit votre lieu de commencement), le jeu nous lâchera un peu dans la nature, nous donnant comme seule piste à suivre une chasse aux brigands des environs, donnée par un marchand juste après le combat. C’est maintenant que tout commence. Il va tout d’abord être vital de recruter des unités afin de mener cette quête à bien, qui n’est finalement qu’un prétexte pour découvrir les mécaniques du jeu, un didacticiel légèrement camouflé en quelque sorte. Cette phase de levée d’armée constitue d’ailleurs le cœur du gameplay, les affrontements étant bien trop difficiles tout seul, et de toutes façons pensées comme des escarmouches, et nécessitera généralement de gérer ses unités pour limiter les défaites.
Le début du jeu n’offrant pas vraiment d’autre choix, c’est auprès des villages voisins que vous trouverez des volontaires, moyennant finance bien sûr. Au fil de la partie, les survivants acquerront de l’expérience leur permettant de se changer en unités plus performantes (mais également plus chères), et il sera possible de faire des prisonniers après les affrontements, qui pourront à terme intégrer vos rangs. Je pense que vous commencez à le voir venir, tout ceci s’accompagne donc d’une grosse partie gestion, que ce soit de l’équipement pour certaines unités (sortes de héros, qui à l’image de votre avatar possèdent des compétences utiles au groupe), la gestion de la faim, des finances également, car une armée coûte cher, mais également celle de vos terres. Car oui, comme tout univers médiéval, les diverses terres sont régies par des seigneurs, possédant eux-mêmes leurs vassaux et dirigeant donc leur peuple. C’est à ce niveau que Mount & Blade arrive à apporter beaucoup de perspectives sur son univers et la place de notre avatar en son sein. Comme évoqué plus haut, aucune grosse trame scénaristique ne va tenir votre partie en haleine, c’est plutôt vous qui façonnerez votre expérience à votre image. Marchant itinérant, pillard, seigneur, autant de possibilités prévues par le jeu et apportant chacune son lot de différences, rendant chaque partie unique, pour un peu qu’on change sa façon de jouer à chaque fois. Mon expérience est finalement assez classique, ayant débuté avec un personnage de basse lignée, gravissant les échelons à force d’enchaîner les faits d’armes, jusqu’à entrer au service d’un seigneur et de disposer de mes propres terres.
C’est à partir de ce moment que le jeu prend une toute autre portée, puisqu’on est intégré aux intrigues politiques et militaires de Calradia, impliquant de répondre aux appels aux armes de son suzerain, mais également de travailler à tisser des alliances entre royaumes. Il sera donc important de bien surveiller l’évolution des différentes frontières, repousser les attaques ennemies sur ses terres, que ce soit un village, une place forte ou bien une ville, influencer l’issue des batailles de ses alliés, ou encore assiéger des positions adverses pour faire s’imposer sa faction. Evidemment, cela s’applique dans le cas où vous prendriez le parti de jouer de manière similaire, car il est tout à fait possible de se désintéresser totalement des affaires du monde, et de jouer selon ses propres règles. Affaiblir le camp qui nous arrange le plus, couper l’approvisionnement en attaquant les caravanes, mettre à sac des villages juste parce qu’on le peut sont autant de choix permis par le jeu, qui joue beaucoup la carte du roleplay. En effet, l’absence de ligne directrice implique forcément un éventail de choix demandant une grande implication au joueur, le mettant face à ses responsabilités et ses envies.
C’est peut-être d’ailleurs là qu’est le plus gros souci du jeu. Le public ciblé est clairement les rôlistes, et assez peu d’éléments sont mis en place pour en faciliter l’accès aux néophytes du genre. Que ce soit dans son esthétique relativement classique, aussi bien dans les graphismes que l’interface, ses mécaniques profondes et assez complexes (encore une fois pour un public non habitué), ou encore le besoin au joueur de s’immerger dans l’univers pour entrevoir tout son potentiel, il n’est malheureusement pas à mettre entre toutes les mains. D’autant plus que l’ambiance générale est résolument old-school, se rapprochant de ce qu’on pouvait trouver sur micro-ordinateurs (ou consoles 16bits), jusque dans les musiques, qui bien qu’orchestrales ont ce petit quelque chose de doux et épique, que je retrouve sur des jeux de cette génération. Pour ceux qui souhaiteraient arranger un peu le jeu pour le rendre jouable selon vos critères, sachez qu’il existe une multitude de mods en tous genres, d’une simple amélioration graphique à une aventure dans une toute autre contrée, voire même l’ajout d’une trame scénaristique. N’ayant pas profité de ces différentes modifications (estimant que le jeu se suffit très largement à lui-même), je ne vous en parlerai donc pas en détail, mais sachez que la communauté est très active et fidèle au jeu, et ce bientôt 10 ans après sa sortie.
Croulant sous la masse des sorties et différents rattrapages, je n’ai malheureusement plus beaucoup de temps à lui accorder maintenant. D’autant plus que sa suite se précise enfin, annoncée quand même depuis déjà 2012. Mais jamais je n’oublierai ce fameux été, à jouer des semaines durant, sous une fenêtre en sous-pente du grenier de mes ex beaux-parents, en pleine canicule, mais bien trop captivé pour m’arrêter malgré la chaleur étouffante de la pièce. Une de mes plus belles expériences de jeu vidéo. C’est pourquoi même si vous être étrangers au genre ou êtes rebutés par son apparence, ou quelque raison que ce soit d’ailleurs, laissez-vous tenter par l’aventure, vous pourriez en sortir changés.